6. Dieu est bientôt mort (Christian)
« Meeeeeeeeeeeeeerde ! pensai-je
- Christian ? Où te caches tu mon garçon ?
Dissimulé dans le confessionnal, je regardai le père Blaise, debout devant l’autel, parcourir l’Eglise du regard, cherchant où j’avais pu me cacher.
- Christian ? Allez, viens. Je ne t’en veux pas, mais il faut que tu me rendes le vin de messe mon petit…
Regardant l’énorme bouteille que je tenais encore dans les bras, un frisson me parcouru le corps. Pourquoi j’avais écouté mon copain Eric ? Je savais que c’était pas bien de voler, et voler dans la Maison de Dieu en plus ! C’était sur que j’allais avoir des ennuis. Et il a fallu que ce soit le père Blaise qui me surprenne en plus ! Sur que j’allais aller en Enfer…
- Hey ! Vous ! Que faites vous ici ?
Je sursautai, ce qui eu pour effet de me faire perdre la bouteille des mains. Le cœur battant à tout rompre, je tentais de la rattraper, jonglant alors avec elle pendant plusieurs très longues secondes avant d’enfin la stabiliser.
Paniqué, je regardai alors le père Blaise a travers le grillage en bois. Comment avait-il fait pour me trouver ? J’étais super bien caché pourtant !
- Que fait-on dans un Temple, mon Père ? dit une voix grave et cassée
Nouveau sursaut, nouvelle séance de jongle. Il y avait une autre personne dans l’Eglise ? Parcourant la salle du regard, je ne voyais personne. En même temps, seulement éclairé par des bougies, la sombre Eglise offrait une tonne de coin d’ombre…
Le père Blaise semblait regarder vers la porte d’entrée, où les ténèbres étaient particulièrement dense.
Il avait d’ailleurs pas l’air très rassuré.
- Je… heu… que puis-je faire pour vous, mon fils ?
Un bruit de pas se fit entendre. Lent, très lent, mais régulier.
Plissant des yeux en direction de l’entrée dans l’espoir de voir le monsieur a la voix grave, je les écarquillai soudain.
C’était sûrement moi et mon imagination. Maman dit toujours que je suis trop rêveur. Pourtant j’étais presque sur que plus j’entendais le monsieur avancer vers le père Blaise, plus l’ombre dans laquelle il était s’étendait.
- Pardonnez moi mon père, car j’ai pêché.
Le père Blaise semblait beaucoup transpirer. Pourtant moi, j’avais froid.
- Mon fils, les confessions se font le Jeudi seulement.
- Celle là ne peut attendre, mon Père.
- Je… heu… Nous devrions aller dans le confessionnal dans ce cas, fit le père Blaise.
J’eu d’un coup la chair de poule alors que le curé faisait quelques pas vers ma cachette. Eric avait vraiment des idées à la con !
- Ce ne sera pas nécessaire mon Père.
Le père Blaise s’arrêta. Je poussai un soupir de soulagement.
- C’est que, la tradition veut que…
- Nous sommes très bien ici.
Le monsieur avait du s’arrêter, je ne l’entendais plus marcher. Mais je ne le voyais toujours pas. Je devinais qu'il devait pas être très loin du père Blaise, a cause de l’effet lumière/ombre. Ça ressemblait au même effet qu'entre Minas Tirith et le Mordor dans le film Seigneur des Anneaux que j’avais vu chez Eric. D’un coté, la « Lumière » avec le père Blaise. De l’autre, a quelques mètres, les « Ténèbres » où se cachait le monsieur.
C’était vraiment marrant. Effrayant, mais marrant.
- Ecoutez mon fils, j’ai un jeune garnement qui se cache dans le coin et qui pourrait tout entendre de votre confessions.
- Je sais mon père, cela ne me gène pas.
Cette réponse n’eut pas l’air de plaire au père Blaise, qui fronça les sourcils.
- Je ne sais pas ce que vous imaginez jeune homme, mais le catholicisme a des règles stricts que nous devons respecter, et…
- Assis, mon Père, fit le monsieur avec une voix beaucoup plus grave, beaucoup plus inquietante.
Il hésita un instant avant de s’asseoir sur l’un des bancs de la paroisse.
- Faisons vite alors mon fils.
- Pardonnez moi mon père, parce que j’ai pêché. Je me suis introduit chez un homme.
- Pourquoi avoir fait cela, mon fils ?
- Parce que c’était un mauvais homme. J’y ai découvert des preuves du Mal qu’il inflige à des innocents.
- Dans ce cas mon fils, vous devez vous tourner vers la justice des hommes. Si vous avez enfrain une loi humaine pour confondre une mauvaise personne, Dieu vous le pardonnera.
- Croyez-vous qu’il pardonnera vraiment mes fautes ?
- Si votre repentance est sincère, oui.
- Et vous ? Vous pardonnera-t-il ceci ?
Comme par magie, une grosse enveloppe brune apparu a la lumière, lancé des ténèbres pour atterrir dans les mains du père Blaise.
Il hésita, l'ouvrit et regarda son contenu.
Il se leva d’un coup et recula vers l’autel. Il avait l’air d’avoir très peur.
- Où avez-vous eu ces photos ? cria-t-il. Qu'est ce que vous voulez ?
- Ce que je veux, mon père ? Nettoyer ce monde. Exorciser les Mal qui le ronge. Devenir plus puissant.
- Ecoutez, c'était une erreur, je le sais maintenant. On peut s'arranger. On peut...
D’un seul coup, toutes les bougies furent soufflées, répandant les ténèbres dans toute l’Eglise. Je me mis à pleurer. Ça devenait trop effrayant. Je voulais ma maman.
- Christian ? Dit la voix du monsieur. Sors s’il te plait.
Les portes de l’Eglise s’entrouvrirent alors, laissant passer un mince filet de lumière. Sans réfléchir, je sortais en courant du confessionnal et me dirigeai tout aussi rapidement vers la sortie. Et, alors que je passai les portes j’entendis encore le père Blaise dire :
- Mon Dieu, aidez-moi !
- Dieu est bientôt mort mon père, fit la voix. Je suis ici pour le remplacer.
Et dans un bruit sourd, les portes se refermèrent, étouffant les cris du père Blaise.