37. Désespoir (Sebastien)
"Oups, il est cassé. Dommage, il avait un certain style, fit le vieux en s'avançant vers moi tranquillement, mains derrière le dos.
Il regarda un instant Kevin, puis Gaëtan, puis finit par me regarder droit dans les yeux, pour me dire d'une voix plaintive :
- Je ne sais vraiment pas prendre soin de mes jouets. Espérons que vous aurez l'obligeance de résister plus longtemps.
- Connard!
Pas très classe comme réplique, je l'accorde. Mais c'est tout ce qu'il me venait à l'esprit. J'étais trop préoccupé par le fait que deux de mes amis gisaient au sol dans un sale état, et que les renforts n'étaient pas sur de venir.
- Dites donc jeune homme, votre ami là bas était plus poli! Surveillez votre langage quand vous vous adressez à Mammon.
Aussitôt qu'il eut prononcé sa phrase, mon sang ne fit qu'un tour.
- Mammon? dis je. Le Mammon?
- Je vois que vous avez entendu parler de moi. Vous rattrapez votre impolitesse de tout à l'heure, s'exclama-t-il d'une voix enjoué.
Bien entendu que j'en avais entendu parlé! Gaëtan, Kevin, si seulement vous aviez été plus prudent... Mais les reproches ne servaient à rien, pour le moment. Le vieux venait de me donner la clé de sa défaite, il s'agissait maintenant de la jouer fine, en attendant une occasion, un moment de distraction de sa part. Il me fallait absolument ne rien laisser paraître.
Je déglutis péniblement, puis je me mis à marcher prudemment vers Gaëtan, situé à une quinzaine de mètres sur ma gauche. Le vieux me regarda, étonné, puis continua :
- Héla, où va-t-il donc? Pensez vous fuir?
- Certainement pas, répliquai-je, irrité qu'il puisse avoir une telle pensée. Vous venez de dérouiller deux de mes amis. Enfin, ils en sont proche. Enfin, disons que je les supporte. J'aimerais quand même voir comment ils vont.
Gagner du temps. Il me faut gagner du temps. Continue de le faire parler. Capte son attention. Tu y es presque. Presque.
- Quel noble personnage. Seulement, une chose me chagrine...
Il disparut, pour réapparaître presque aussitôt à côté de moi, tenant fermement mon poignet gauche que je pensais avoir avancé le plus discrètement possible, de manière à l'immobiliser, rendant impossible pour moi de saisir la garde du katana de Gaëtan, planté dans le sol juste à côté de lui.
-... J'ai horreur qu'on me prenne pour plus idiot qu'un mortel.